21 janvier 2021

T'as un sou pour la chaise ?

Autrefois, alors que la pratique religieuse imposait la fréquentation “obligatoire” de la messe dominicale, les habitants du village se faisaient un plaisir et un devoir d’enfiler les “habits de dimanche” pour se rendre à la grand-messe programmée pour 10 heures.

Le beau costume bien brossé, le col de chemise amidonné, une cravate du plus bel effet, le pantalon bien repassé telle était la tenue pour les hommes qui ne pouvaient surtout pas oublier la petite monnaie dans le fond de la poche.
Les dames se souciaient surtout de paraître sous leurs plus beaux atours pour celles qui en avaient les moyens : le dernier tailleur enjolivé par les vieux bijoux de famille, le sac à main pour remplacer les poches, et surtout la coiffe couronnant la personnalité. Pour les autres, celles qui ne se prenaient pas pour “madame chapeau”, le fichu couvrant les cheveux et la vieille gabardine suffisaient amplement. Cachés dans une des poches, le porte-monnaie, le livre de messe ou le chapelet étaient les objets indispensables pour être une bonne paroissienne.
Après une bonne dizaine de minutes, lorsque tous les retardataires étaient bien arrivés et avaient pris place dans l’une des nefs, souvent dans le fond de l’église pour faciliter le bavardage, le “chaisier” commençait son tour entre toutes les rangées de chaises.
S’il était corpulent, grisonnant, avec une belle moustache, il s’arrêta devant chacun des fidèles assis, en leur tendant la main dans laquelle les gens y déposèrent une pièce trouée, 25 centimes, en guise de “location pour la chaise qu’ils occupent”.
Il se prénommait Jules, un retraité dévoué qui chaque dimanche, était fidèle à sa mission : ramasser les sous de la chaise. Et personne n’aurait osé ne pas vouloir payer !

Tandis qu’il n’avait pas encore terminé sa tournée, de l’autre côté de la nef, un autre paroissien bénévole commençait la quête à l’aide d'un récipient à poignée, en cuivre, qu’il passait entre les rangs de paroissiens qui “mettaient ce qu’ils voulaient”, tandis que le quêteur murmurait entre les dents un discret et répété “M....ci”. Filous, certains y déposèrent... un bouton, d’autres se limitaient à taper du doigt le fond de la “casserole”. Généreux, de rares paroissiens y déposèrent généreusement un billet qu’ils déployaient ostensiblement à l’arrivée du quêteur.

Au fil des ans, cette coutume paroissiale a petit à petit disparu.



6 commentaires:

  1. Ce n'était pas Jules qui jouait aussi de l'orgue ?

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. L'organiste était Jules Daeren, le papa de René, ancien président du patronage, récemment dcd.

      Supprimer
  2. Merci Michel, donc ce n'était pas le même Jules !!!

    RépondreSupprimer
  3. Chez les mountches, aussi, le dimanche était un grand jour ! Les cloches sonnaient à 7 h, à 8 h et à toute volée à 19 heures pour les trois rendez-vous dominicaux.(Pour les plus pieux, il y aurait encore les vêpres à 15 h. et le salut à 19 h.)
    Le trajet ver l'église ressemblait parfois à un défilé de mode, surtout les jours de petites et grandes communions. C'état l'occasion pour sortir les nouveaux costumes et les nouvelles toilettes : voilettes, plumes, fourrures accompagnaient les chapeaux et
    casquettes. Certaines familles étaient bien ordonnées : les enfants devant par ordre de grandeur et les géniteurs derrière.
    Dès l'entrée à l'église, il fallait tremper ses doigts dans l'eau bénite et faire son signe de croix, puis rejoindre une place bien définie par les écoles pour les plus petits. Les hommes et les garçons à droite, les femmes et les filles à gauche.
    A cette époque, pas question de s'asseoir ! A genoux.sur les chaises de paille tressée. Mes genoux en gardent encore des traces.
    La messe pouvait commencer au son d'un ting-ting activé par l'enfant de coeur. Une heure de prières et de chants en latin s'en suivraient.
    Puis soudain, une odeur d'écurie venait nous titiller les narines : la chaisière !
    Vite, fallait sortir sa pièce pour qu'elle passe au plus vite !
    Côté des femmes, il y avait des prie-Dieu. Pour les plus favorisées, ces chaises étaient capitonnées de velours aux genoux et aux coudes. Une plaque de cuivre portait de nom de l'abonnée dévote qui payait son abonnement à l'année.
    Malheur à celle qui aurait d'audace d'occuper cette chaise. Un crochet latéral permettait de fixer le sac à main et un espace pouvait recevoir le missel.
    Après le sermon, une paire de bénévoles se chargeaient de récolter la quête. Ceux qui désiraient aller à l'offrande devaient prévoir une troisième pièce !
    Les plus fervents iraient à la communion en revenant fiers comme des coqs ou des poules en n'omettant pas un clin d'oeil de ci et là...
    Après une conversation avec Jésus, encore quelques minutes de patience pour le chant libératoire "ite missa est"...
    Les resquilleurs avaient réussi à garder une pièce qui suffirait à se payer un caramel au boulanger du coin.
    Les femmes iront faire leurs courses et commérer tandis que les hommes passeraient le reste de la matinée à boire des pintes en jouant aux cartes soit au billard pour se donner de l'appétit et attaquer le porc en croûte. C'étaient des dimanches heureux...

    RépondreSupprimer
  4. Raoul12:08

    Ah les chaises personnalisée. Situées à l'avant et capitonnées. Et réservées à la bourgeoisie nantie qui se faisait un plaisir de s'y installer. Beaucoup plus d'ailleurs pour se montrer et pour exposer son statut social que pour prier. En tant que fils d'ouvrier, je détestais cette attitude condescendante.

    RépondreSupprimer
  5. Je me souviens encore : la chaisière se prénommait "Marie" et on lui donnait le surnom de "Marie brouette". La tradition voulait que la quête faite lors des mariages lui soit laissée. Elle le faisait savoir en passant entre les chaises..."C'est pour la chaisière" ! Son mari vendait du lait, du beurre, des oeufs...

    RépondreSupprimer